Intervention dans le camp de déplacés de Khazer
Depuis le début de l’offensive pour reprendre la ville de Mossoul, le 17 octobre dernier, plus de 55 000 personnes ont été déplacées. Plusieurs milliers d’entre elles ont trouvé refuge dans le camp de Khazer, situé à une quinzaine de kilomètres des lignes de fronts.
Une petite fille déplacée joue dans le camp de Khazer. | © E. Fourt / Handicap International
Lorsque l’on pénètre dans ce camp, la première chose qui surprend est le nombre d’enfants. Beaucoup d’entre eux jouent au milieu de tentes blanches et bleues, semblant apprécier le fait de pouvoir enfin s’amuser en plein air. « Plus de la moitié de la population est âgée de moins de 18 ans, à Khazer », indique Maud Bellon, chef de projet pour l’intervention de Handicap International auprès des déplacés de Mossoul. L’association commencera dans quelques jours son intervention dans le camp, pour venir en aide aux personnes qui fuient les combats. « Il y a un vrai problème d’accessibilité ici, ce qui laisse penser que beaucoup de personnes ne reçoivent pas forcément l’assistance dont elles ont besoin », commente Maud, lors de sa visite des lieux. « Nous devons nous assurer que personne ne soit oublié dans cette réponse d’urgence. »
Au détour d’une allée, un vieil homme marche péniblement sur le gravier, sa canne vissée à la main. Mohamad, 70 ans, est originaire de Gogjali. Il y a moins de deux semaines, sa ville a été reprise au groupe Etat Islamique. Trois jours plus tard, il arrivait avec sa famille dans le camp de Khazer. « C’est dur pour moi de me déplacer ici », explique-t-il. « J’aimerais avoir une chaise roulante, cela pourrait m’aider sur les longues distances… » Le vieil homme partage également avec les responsables de l’association ses préoccupations au sujet de ses petits-enfants. « Mon petit-fils est devenu partiellement sourd avec les bombardements que nous avons vécus, et ma petite-fille a beaucoup de difficultés à s’endormir la nuit avec tout ce qu’elle a vu », dit-il.
« Handicap International va mettre en place des séances de kinésithérapie et donner du matériel aux personnes ayant des difficultés à se déplacer. Nous allons aussi mener des sessions de soutien psychologique pour les personnes qui, comme les petits-enfants de Mohamad, sont en situation de stress, d’angoisse ou de détresse émotionnelle », explique Maud Bellon.
Un peu plus loin, un homme amputé se déplace à l’aide de béquilles à moitié cassées. « Je les ai achetées sur le marché de Mossoul, il y a quelques années », raconte-t-il. Arrivé avec sa famille il y a dix jours, il se plaint aussi du manque d’accessibilité du camp. Et il semble encore particulièrement secoué par ce qu’il a vécu au cours des deux dernières années. « Les combattants du groupe Etat Islamique contrôlaient constamment ce qu’on faisait et ils nous confisquaient tout », raconte-il. « Ils prenaient même nos téléphones pour que nous ne puissions pas communiquer avec l’extérieur … et ceux qui ne se conformaient pas aux ordres se retrouvaient tués. Nous avons vécu dans la peur jusqu’au dernier instant : lors de notre fuite de Mossoul, les combattants nous tiraient dessus. Ce n’est qu’en arrivant dans le camp que nous nous sommes sentis en sécurité. »
Les deux hommes ayant croisé le chemin de l’équipe de l’association lors de cette visite, ne sont pas des exceptions. Le responsable du camp confirme qu’il a vu beaucoup de personnes ayant des difficultés à se déplacer, parmi la population arrivée au cours des dernières semaines. Dans quelques jours, des équipes de kinésithérapeutes, de psychologues, de travailleurs sociaux et d’éducateurs aux risques des mines sillonneront donc le camp, pour apporter leur assistance à ces déplacés, en situation de handicap ou de vulnérabilité.