Un cinquième des réfugiés syriens présentent un handicap
D’après une nouvelle étude réalisée par HI et iMMAP[1], plus de 60 % des ménages de réfugiés syriens comptent une personne handicapée ; un cinquième des réfugiés au Liban et en Jordanie présentent un handicap. Menée entre 2017 et 2018, cette enquête a pour l’instant débouché sur deux rapports, quatre fiches d’information et un tableau de bord qui fournit des données statistiques sur les personnes handicapées parmi les réfugiés syriens et leur accès à l’aide humanitaire. Yahoko Asai, coordinatrice technique régionale de HI en charge de l’inclusion, explique l’importance de cette étude :
[1] IMMAP est une ONG internationale qui fournit des services professionnels de gestion de l’information aux organisations humanitaires et de développement via la collecte, l’analyse et la représentation visuelle de données leur permettant de prendre des décisions éclairées dans le but ultime de fournir une assistance ciblée de grande qualité aux populations les plus vulnérables au monde.
Couverture du rapport jordanien | © Bas Bogaerts / HI
Pourquoi mener une enquête sur le handicap parmi les réfugiés ?
Cette enquête a pour objectif de fournir aux ONG des informations précises sur les personnes handicapées parmi les réfugiés en Jordanie et au Liban, et de les encourager à adapter la mise en œuvre de leurs programmes en tenant compte des besoins des personnes handicapées.
Pourquoi une telle enquête était-elle nécessaire ?
On observe un intérêt croissant des humanitaires pour le handicap dans les contextes d’urgence. Toutefois, nous disposions jusqu’alors de peu d’informations sur le nombre de personnes handicapées et les obstacles qui compliquent leur vie quotidienne. Ce manque de données est l’une des principales causes d’exclusion et de discrimination : les acteurs humanitaires ne sont pas conscients des difficultés rencontrées par les personnes handicapées pour accéder à l’assistance humanitaire (hébergement, eau, santé, éducation, etc.). Les chercheurs ont ventilé les données par handicap, âge, genre et lieu. Cette étude est une précieuse source d’informations sur le handicap, où se trouve les personnes handicapées, les difficultés qu’elles rencontrent et les mesures qu’elles jugent importantes à mettre en œuvre...
Quelles sont les principales conclusions des rapports ?
Dans les deux pays, 22,8 % des réfugiés syriens présentent un handicap, soit plus d’un réfugié sur cinq. 61,4 % des ménages comptent au moins une personne handicapée. Cela signifie que de nombreux ménages doivent fournir du temps et de l’argent supplémentaires pour prendre soin de leurs proches et pour chercher les informations et les services pertinents, sans parler de l’investissement physique ou affectif... Les ONG doivent mieux tenir compte de l’impact du handicap sur les ménages et mettre en place des programmes de soutien familial appropriés.
L’étude met en évidence un lien étroit entre la pauvreté et le handicap...
En effet ! Les données issues de Jordanie montrent que les ménages les plus pauvres sont plus susceptibles d’avoir des enfants handicapés que les ménages appartenant aux tranches de revenus supérieures. Environ 80 % des enfants handicapés vivent dans des ménages pauvres.
Quelles sont les causes du handicap ?
28 % des personnes handicapées identifient la maladie comme cause première. Beaucoup déclarent également avoir un handicap de naissance. Enfin, environ un tiers des personnes ayant identifié la maladie, une blessure ou la malnutrition comme cause de leur handicap indiquent le conflit à l’origine.
Le rapport présente l’anxiété comme une forme de handicap. Pourquoi ?
L’anxiété et la dépression peuvent entraîner des difficultés, notamment pour communiquer, pour sortir de chez soi et pour être actif au quotidien. L’étude montre que les enfants souffrent souvent d’anxiété et de dépression. Dans le camp de Zaatari en Jordanie, en particulier, près de 20 % des enfants âgés de 5 à 17 ans ressentent quotidiennement une profonde anxiété. Les ONG doivent concentrer leurs activités sur la santé mentale et le soutien psychosocial, en prêtant une attention particulière aux jeunes.
L’étude détaille les obstacles rencontrés par les personnes handicapées…
Il est bien plus difficile pour une personne handicapée de trouver un emploi. Quant aux enfants handicapés, en particulier les garçons, ils sont plus susceptibles d’abandonner l’école. Les obstacles rencontrés sont également décrits : certaines infrastructures, comme les toilettes, ne sont pas toujours accessibles aux personnes handicapées. Ce manque d’accessibilité touche également les personnes valides. Dans certains endroits, les services de santé ne sont pas accessibles en raison de leur coût élevé, du manque de transports ou de l’attitude dissuasive du personnel de terrain. Grâce à l’enquête, les travailleurs humanitaires connaissent précisément les failles et les domaines à améliorer.
Quelles sont les prochaines étapes ?
HI et iMMAP continueront à diffuser le rapport auprès des acteurs humanitaires, à organiser des réunions pour expliquer ses conclusions et à plaider pour l’inclusion des personnes handicapées dans les interventions humanitaires. Nous collaborerons notamment avec le ministère australien des Affaires étrangères et du Commerce, qui a permis la réalisation de cette étude, afin d’inciter d’autres donateurs à inclure les personnes handicapées dans leurs interventions humanitaires.