« Le pont entre nos deux vies s’est brisé »
En décembre 2016, Harith a été touché par un tir de roquette à Mossoul. Grièvement blessé à la jambe, il a fui les combats avec sa famille et a trouvé refuge dans le camp de déplacés de Hasansham (Kurdistan irakien). Les équipes de Handicap International lui procurent des soins de kinésithérapie et des séances de soutien psychologique.
Harith, dans la tente familiale à Hasansham | © E. Fourt / Handicap International
Aujourd’hui, une équipe de Handicap International rend visite à Harith. Mohammad, kinésithérapeute de l’association, souhaite initier une nouvelle session de réadaptation avec le petit garçon. « Des mois après sa blessure, il souffre encore beaucoup et a du mal à marcher. Mon but est de l’aider à se déplacer. Aujourd’hui, c’est sa troisième séance de kinésithérapie. »
Les grandes tiges de métal qui sortent de la jambe de Harith témoignent de l’intensité de son accident. Younes, son père, raconte : « A la fin de l’année dernière, les bombardements ont commencé dans notre quartier. Un matin, nous avons décidé de fuir la ville en voiture et une roquette nous est tombée dessus. Mon frère est mort sur le coup, et mon fils a été grièvement blessé. Nos voisins nous ont emmenés à l’hôpital, où nous sommes restés une semaine. » Cet incident marque le début d’une série d’épreuves pour la famille de Harith. « A notre sortie de l’hôpital, nous nous sommes réinstallés dans une zone près de chez nous, mais le mois suivant, les bombardements ont recommencé et nous avons dû fuir à nouveau. Nous avions très peur, nous ne cessions de nous déplacer d’un endroit à un autre, au rythme des explosions. C’est après plusieurs semaines que nous sommes arrivés ici. »
Harith vit désormais avec dix membres de sa famille, dans une tente du camp de Hasansham. « La vie est dûre ici », ajoute son père, « mais se sentir en sécurité n’a pas de prix. » Nada, la mère du petit garçon, semble avoir plus de difficulté à accepter leur situation que son mari. « Nous vivions tellement bien, il y a encore quelques années. C’est comme s’il y avait un pont entre notre vie passée et notre condition actuelle, et que celui-ci avait été bombardé aussi », dit-elle, visiblement touchée.
Alors que ses parents se confient à Diana, travailleuse sociale de Handicap International, Harith continue ses exercices de réadaptation avec Mohamad. Le kinésithérapeute l’encourage au fil des exercices mais le petit garçon garde les sourcils froncés : chacun de ses mouvements est une épreuve, même plusieurs mois après avoir été blessé. Pour tenter de lui faire oublier la douleur pendant quelques instants, Diana et Mohamad proposent alors une activité de dessin. La travailleuse sociale sort un crayon et un cahier et commence à discuter avec le petit garçon alors qu’il trace une maison sur la première feuille de papier. Pendant ce temps, Mohammad continue de stimuler les muscles de la jambe de Harith.
La session de kinésithérapie touche à sa fin et Harith finalise son dessin. Il dit alors timidement à Diana : « A l’école du camp aussi, on dessine. J’adore aller là-bas. J’aime surtout étudier les sciences… ». L’arrivée du petit garçon dans le camp lui aura permis d’aller à l’école pour la première fois. « Dans quelques mois, je pense qu’il pourra remarcher correctement, et ses parents n’auront plus besoin de le porter jusqu’à là-bas, il pourra y aller tout seul, comme ses copains », indique Mohammad, faisant un clin d’œil au petit garçon. « J’espère étudier beaucoup, » conclut Harith, « Je voudrais être infirmier quand je serai grand. »
Harith dessine lors de la séance de kinésithérapie. © E. Fourt / Handicap International