Il y a un an : l’explosion à Beyrouth, le 4 août 2020
La responsable de l’action d’urgence pour Humanité & Inclusion (HI) au Liban Zeina Salhani raconte le jour de la catastrophe.
La responsable de l’action d’urgence pour HI au Liban Zeina Salhani | © Tom Nicholson / HI
Zeina Salhani, responsable de l’action d’urgence pour HI au Liban au moment de l’explosion, nous livre son témoignage.
Quels sont vos souvenirs de ce tragique événement ?
Mon souvenir le plus marquant, ce sont les cris des gens dans la rue et les personnes blessées. Je suis encore très émue en pensant aux familles des personnes qui ont été tuées. Ces souvenirs restent vivaces, notamment du fait que les familles des victimes ne connaissent toujours pas les raisons de l’explosion.
J’essaie de ne pas repenser à tout ce que j’ai vécu ce jour-là, au moment de l’explosion. Nous avons tous eu une telle peur pour nous-mêmes et nos familles... Nous étions en état de choc. Nous nous demandions tous ce qui s’était passé. L’explosion elle-même n’a duré que quelques instants mais nous avons vécu et ressenti tant de choses à ce moment-là.
Comment avez-vous vécu l’intervention de HI ?
La catastrophe a touché le personnel de HI. Nous n’avons pas souffert physiquement de l’explosion, mais chacun d’entre nous connaît un membre de sa famille ou un ami qui a été blessé. Nous avons été émotionnellement et psychologiquement impactés. Pressés par la nécessité d’agir, nous n’avons pas pris le temps d’analyser ces émotions.
L’explosion a eu un impact bien plus important que ce que nous aurions pu prévoir. Les services de santé ont été durement touchés et de nombreux hôpitaux de la zone ont été détruits. À l’époque, la pandémie de Covid-19 faisait rage. Les hôpitaux étaient déjà pleins et ont dû accueillir un flux supplémentaire de patients. En tant que membre de HI, j’ai pu aider les autres et agir. J’étais si fière de faire partie de cette équipe. Notre principal objectif consistait à atteindre les plus vulnérables. Nous savons que certaines personnes sont souvent laissées de côté dans les situations d’urgence, notamment les personnes âgées et les personnes handicapées. Nous devions donc localiser ces personnes et leur venir en aide comme aux autres personnes touchées par l’explosion.
Comment HI a répondu à l’urgence ?
Au lieu de demander aux gens de venir dans les centres pour bénéficier des services, nous sommes allés les trouver chez eux. Cela a facilité l’accès aux services spécifiques, en particulier pour les personnes qui ne peuvent se rendre dans les centres : nous allons chez les gens, dans la rue et dans les quartiers ; nous demandons aux personnes et à leur famille quels sont leurs besoins et leurs priorités du moment. Cela nous permet de ne laisser personne de côté, en particulier les enfants, les personnes âgées et les personnes handicapées. Nous fournissons ensuite les services habituels : réadaptation, réadaptation fonctionnelle, santé mentale, distribution d’aides techniques, trousses d’hygiène et d’hygiène féminine, etc. Pour les services qui ne sont pas proposés par HI, nous avons veillé à bien orienter les personnes et à effectuer un suivi étroit afin de nous assurer que leurs besoins ont été correctement pris en charge.
Cette approche a été largement acceptée par les bénéficiaires, qui ne manquent pas de nous le faire savoir. Ils affirment que c’est la première fois qu’une organisation leur fournit des services de façon aussi respectueuse. Un jour, alors que je marchais dans la rue avec un t-shirt portant le logo de HI, un jeune homme m’a interpelée pour me dire que nous les avions aidés, sa mère et lui. Lors de l’évaluation de la satisfaction des bénéficiaires, nous avons également reçu des commentaires extrêmement positifs. Les personnes interrogées ont appelé de leurs vœux des services supplémentaires, mettant en avant la demande et les besoins existants.
Qu’avez-vous pensez du soutien international ?
Nous allons bientôt commémorer le 4 août 2020. Profitons-en pour remercier tous les donateurs qui ont soutenu les actions de HI et d’autres organisations après l’explosion. Les ONG constituent le premier recours de la population, à l’heure où les services publics se font rares et où les habitants n’ont plus les moyens d’y accéder. Les ONG sont ainsi devenues les principaux prestataires de services et les principaux soutiens de la population. Les besoins supplémentaires ne sont pas simplement liés au fait qu’un an s’est écoulé depuis l’explosion. Dans cette situation complexe, les besoins et l’aide nécessaire augmentent chaque jour.