Pourquoi un Observatoire des bombes à sous-munitions ?
Anne Héry , directrice du plaidoyer de Handicap International, nous explique ce qu’est le rapport de l’Observatoire des sous-munitions publié chaque année en septembre.
En quoi consiste cet Observatoire des sous-munitions ?
L’Observatoire des mines et des armes à sous-munitions est un groupement d’ONG co-fondé par Handicap International en 1998 et que l’association co-dirige depuis. Il publie deux rapports annuels, un sur les sous-munitions en septembre, un autre sur les mines antipersonnel en novembre, ainsi que de nombreuses notes d’analyses. Les rapports rendent compte de la bonne application ou non des Conventions d’interdiction, celle d’Oslo qui interdit les sous-munitions et celle d’Ottawa qui interdit les mines antipersonnel. Pour cela, une équipe éditoriale d’une douzaine de personnes est mobilisée à partir de mars avec l’aide d’une quarantaine de chercheurs dans le monde.
Sur quoi porte exactement le rapport sur les sous-munitions publié cette année le 1er septembre1 ?
Il s’agit d’un bilan annuel de l’application de la Convention d’Oslo : les Etats Parties ont-ils respecté leurs obligations ? Ont-ils mené ou soutenu des opérations de déminage ? Ont-ils mis en place des politiques pour aider les victimes ? S’ils en possédaient, ont-ils détruits leurs stocks de sous-munitions ? Quelle est la position des Etats non parties sur la Convention ? Lesquels continuent d’en produire, d’en vendre ? Le rapport recense également les nouvelles utilisations et victimes de sous-munitions chaque année dans les zones de conflit.
Cela veut dire que les signataires de la Convention ont des obligations ?
Effectivement, en signant la Convention un Etat accepte un certain nombre d’obligations, comme ne plus utiliser, produire ou commercialiser les sous-munitions, mais également détruire les stocks, venir en aide aux victimes, soutenir le déminage des zones contaminées, etc. Le rapport fait état des politiques et actions mises en place dans chaque pays signataire pour la bonne application de la Convention.
A quoi sert un tel rapport ?
C’est un document indispensable pour suivre l’application de la Convention. Il est d’ailleurs devenu le document de référence même pour les Etats ! Il est utile pour dialoguer avec les Etats, pour les inciter à rejoindre la Convention, à mieux l’appliquer sur tel ou tel point. Le rapport porte également sur la place publique les exactions et problèmes posés par les sous-munitions sur la base de faits compilés et vérifiés. Il nous aide à exercer des pressions politiques. Cette année, par exemple, il documente la très forte utilisation de sous-munitions par l’Arabie Saoudite dans des zones civiles au Yémen. Nous avons un moyen de pression politique sur ce pays, mais aussi ses alliés : à tel pays nous pouvons dire : regardez ce que fait votre partenaire.
Quelles sont les principaux enseignements du rapport 2016 ?
L’année 2015 a été marquée par une très forte utilisation des sous-munitions en Syrie et au Yémen. Les civils représentent la quasi-totalité des victimes. C’est effroyable. D’un autre côté, de plus en plus d’Etats rejoignent la Convention. Les stocks sont progressivement détruits, ce qui réduit peu à peu les sources d’approvisionnement.
Que fait Handicap International pour aider à éradiquer les sous-munitions ?
Nous menons des programmes de déminage et de sensibilisation aux risques liés à la présence des restes explosifs dans de nombreux pays. Parallèlement, Handicap International est donc membre de la coalition d’ONG contre les sous-munitions, celle-là même qui publie le rapport de l’Observatoire. Nous possédons une équipe de lobbyistes politiques qui dialoguent avec les Etats et les instances internationales, comme les Nations unies, pour faire progresser le droit humanitaire international. Nous menons enfin des campagnes de sensibilisation auprès du grand public pour qu’à son tour, il fasse pression sur les Etats. Une pétition rassemblant des centaines de milliers de signataires est un argument de poids auprès des gouvernements.